De violents heurts ont éclaté dimanche 12 juin à Jisr Al-Choghour, où l'armée s'est déployée en force pour reprendre le contrôle de cette ville du nord-ouest de la Syrie que des milliers d'habitants ont fui ces derniers jours.
- L'armée syrienne pénètre dans Jisr Al-Choghour
En proie à une forte protestation anti-régime, le gouvernorat d'Idleb (nord-ouest), à 330 km au nord de Damas, fait l'objet d'une opération d'envergure de l'armée depuis vendredi. "Ils sont en train d'attaquer à Jisr Al-Choughour avec des chars, des hélicoptères et de l'artillerie lourde", a raconté Ali, un réfugié syrien de 27 ans arrivé en Turquie.
Un militant sur place a raconté par téléphone que tôt dimanche matin "l'armée a commencé à pilonner d'une manière intense la ville à partir de chars et avec des armes lourdes, ensuite elle a pris d'assaut la ville". La télévision publique a elle aussi indiqué que les troupes sont entrées dans Jisr Al-Choghour dimanche matin.
- Interprétations divergentes des affrontements à Jisr Al-Choghour
Ville de 50 000 habitants, Jisr Al-Choghour est quasi-déserte depuis une semaine en raison des combats qui s'y déroulent. "Il y a maintenant une séparation au sein de l'armée et un groupe essaie de protéger les gens : il a fait sauter deux ponts", a ajouté Ali, affirmant tenir ces informations de personnes qui ont fui la ville dimanche et sont arrivées en Turquie le jour même. Une affirmation qui semble corroborée par la télévision d'Etat selon qui les troupes "ont désamorcé les explosifs et les charges de dynamite posés par ces groupes armés sur les ponts et dans les rues".
En reprenant la ville, les militaires ont découvert "une fosse commune" contenant les dépouilles des membres des agents tués lors de l'attaque du QG de la Sécurité, le 6 juin, a annoncé la télévision. Selon Damas, 120 policiers ont été tués ce jour-là par des "groupes armés", dont 82 au QG. Mais des opposants et des témoins ont contesté la version officielle et ont affirmé que les policiers avaient péri lors d'une mutinerie. Les restrictions imposées aux médias étrangers par les autorités empêchent toute vérification indépendante.
- La traversée de la frontière se complique pour les réfugiés
La répression a poussé plus de 5 000 personnes à trouver refuge en Turquie, distante d'une quarantaine de kilomètres à peine. Ankara a promis d'accueillir tous les réfugies syriens. Une fois arrivés près du village de Güvecci, ils sont installés dans des camps érigés par le Croissant-Rouge.
"Mais il est plus difficile maintenant de s'approcher de la frontière : les soldats et les policiers en civil empêchent les voitures de réfugiés de passer. Il faut les contourner en secret", précise Mohamed.
"Mais il est plus difficile maintenant de s'approcher de la frontière : les soldats et les policiers en civil empêchent les voitures de réfugiés de passer. Il faut les contourner en secret", précise Mohamed.
- Washington dénonce une "crise humanitaire"
Face à une contestation sans précédent depuis près de trois mois, le régime de Bachar al-Assad continue de mater les manifestations avec force. Vendredi encore, les forces de l'ordre appuyées par des hélicoptères ont tué au moins 25 civils dans tout le pays. Depuis le 15 mars, plus de 1 200 opposants sont morts et 10 000 autres ont été arrêtés, selon des ONG.
La Maison Blanche a haussé le ton samedi en dénonçant une "crise humanitaire"provoquée par Damas. "Les Etats-Unis appellent le gouvernement syrien à cesser cette violence, et à donner au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) un accès immédiat et sans entraves à la région [du Nord-Ouest]", a-t-elle déclaré. Même demande pour un accès "immédiat et illimité" pour la Croix-Rouge exprimée dimanche par l'Italie et la France.
"La France condamne fermement la poursuite de plus en plus brutale de la répression en Syrie, y compris avec l'utilisation d'armes lourdes comme à Jisr Al-Choghour d'où de nombreux civils fuient la répression en cherchant refuge en Turquie", affirme le ministère des affaires étrangères dans un communiqué. "Cette situation inacceptable, qui alourdit encore le bilan des victimes civiles en Syrie, crée une menace pour la stabilité régionale. Elle doit cesser", déclare le porte-parole du ministère, Bernard Valero.
- Le Conseil de sécurité de l'ONU peine à s'accorder sur une résolution
Aux quinze membres du Conseil de sécurité de l'ONU qui doivent poursuivre leurs discussions pendant le week-end faute d'avoir pu se mettre d'accord à ce jour sur une résolution, le ministre des affaires étrangères britannique William Hague a lancé un appel : il est temps de prendre une "position claire." Un appel relayé dimanche par le chef de la diplomatie allemande, Guido Westerwelle, pour qui "la situation dangereuse qui prévaut actuellement rend particulièrement urgente une réaction claire du Conseil de sécurité".
De son côté, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon s'est dit "très triste et très inquiet" et a demandé au président Assad de "prendre des mesures immédiates et décisives et écouter son peuple".
Source: Lemonde
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